dimanche 7 juin 2015

Cas Mille (nouvelle) Les Ignobles (roman), de Huguette Conilh


Résumé 
Ils sont les ignobles, victimes de leur différence, souffre-douleur des cours d’école, les proies de l’ignorance que l’intolérance met en marge de la société. Pour échapper au tableau des opprobres, Camille a préféré couper les ponts avec sa famille.
Jusqu’au jour où la mort de ses parents dans l’incendie de leur maison l’oblige à reprendre le chemin de la Vienne. Il recueille alors son frère cadet, Mathis, un adolescent torturé par la culpabilité de n’avoir pu sauver ses parents.
En 2014, nous vous avons offert la nouvelle d’Huguette Conilh « Cas mille », en 2015, achetez « Les Ignobles » et découvrez toute la richesse de l’écriture de l’auteure.


Mon avis 

Huguette Conilh est une auteur éclectique, qui n’en n’est pas à son premier roman. Entre romance, policier et même une nouvelle fantastique, elle aborde dans Cas Mille (la nouvelle) et les Ignobles (le roman) des sujets qui lui sont chers, tel que la différence et la tolérance. 

La nouvelle « Cas Mille » constitue une bonne introduction au roman. On y découvre deux frères : Camille, l’aîné et Mathis, encore enfant. 
Le premier a décidé de partir, pour éviter que sa famille n’éclate en se trouvant confrontée à son lourd secret : son homosexualité. 
Il dévoile dans cette nouvelle ses premiers émois, son premier amour, sa différence, qu’il assume, mais qu’il ne souhaite pas imposer, face à une famille intolérante et hostile. Il fait le choix d’être lui-même, malgré le sacrifice de la séparation. On découvre donc un personnage fort et sensible. La complicité qui le lie à son petit frère, évoquée dans la nouvelle, influe énormément sur l’intrigue du roman. 

Dans le roman, suite à la mort de leurs parents, Camille décide d’accueillir Mathis chez lui. Le cadet bien que traumatisé par l’incendie qui a coûté la vie à ses parents, se réjouit de retrouver son frère. Pourtant tout n’est pas si simple entre les deux frères et la communication plus compliquée que prévu.

Le roman se fixe sur quatre personnages que l’on suit avec plaisir : Camille et son frère Mathis, Aaron, le colocataire et Norbert le propriétaire et voisin. 
La plume d’Huguette Conilh est fluide, vive et efficace, son approche des personnages approfondie. Elle insiste avec délicatesse, justesse et pudeur sur leurs petits secrets, ne les épargne pas et les pousse dans leurs retranchements. Ils se révèlent très humains, à travers les diverses facettes de leur personnalité, même les moins avouables. En effet, l’auteure n’hésite pas à nous montrer leur mauvaise fois, leur immaturité, mais contrebalance avec une certaine tendresse pour ses personnages, car leurs qualités ne manquent pas. On s’attache à eux et on voudrait les voir s’en sortir, tant ils font face avec courage aux situations difficiles. Ils affrontent ces épreuves, évoluent au cours du roman, deviennent plus adultes ou plus sages, apprennent à se comprendre, à communiquer et à devenir plus tolérants.

Si le roman suit ces quatre personnages, dont on retrouve les points de vue successifs dans la narration, il se centre tout de même autour de Mathis, le plus jeune de tous.
Mathis s’avère être un gamin paumé, en souffrance, réclamant l’attention de son frère, qui l’a laissé en plan alors qu’il lui avait promis de revenir le voir après son départ. Mathis réagit également très mal à l’homosexualité de celui qu’il a idolâtré pendant tant de temps. Il enchaîne les caprices, et les actes inconsidérés, comme pour lancer un signal d’alarme.
Camille éprouve bien du mal à éduquer ce garçon difficile et arrogant et à concilier son arrivée avec sa vie quotidienne et amoureuse. Il n’est pas prêt pour autant à sacrifier son couple.
Les relations entre Mathis et Aaron démarrent mal et restent toujours compliquées : ce sont deux êtres en souffrance bien trop semblables et qui se disputent, en quelque sorte, l’amour et l’attention de Camille.
Mathis trouve souvent refuge chez Norbert, le propriétaire handicapé avec qui il peut discuter et se confier.

Le roman est une belle leçon de vie et de tolérance. Huguette Conilh évoque aussi des sujets sensibles, autres que l’homosexualité: les relations familiales compliquées, le handicap, le suicide, la difficulté de Mathis de s’adapter dans son lycée et de trouver des amis. Tous font partie d’une réalité, que nous connaissons de près ou de loin et l’auteur les aborde avec franchise et crédibilité.
Les émotions et sentiments sont très présents et fort bien décrits. Les événements s’enchaînent. On tremble pour Mathis, on a envie de le dissuader ou de l’encourager dans bien des situations, mais jamais on ne s’ennuie. 

La fin prend tout de même le lecteur par surprise, car l’on s’attend à en savoir un peu plus sur les réactions de chacun, suite aux révélations que l’auteure nous fait. Huguette Conilh a, en effet, analysé les événements à travers le roman toujours dans le détail et nous lâche immédiatement après nous avoir révélé le plus lourd secret de Mathis. Certes, celui ci explique pas mal de chose, mais je suis restée, je l’avoue, sur ma faim…

En conclusion: je conseille vivement la lecture de Cas Mille (nouvelle téléchargeable gratuitement), avant de lire le roman « Les ignobles », mais si vous vous plongez dedans, vous ne pourrez que poursuivre ! La plume d’Huguette Conilh, son exploration des personnages et de leur psychologie happe le lecteur. J’ai fort apprécié ce roman, qui change de mes lectures M/M habituelles et propose une expérience différente, plus proche de la réalité. Je remercie le forum « Au cœur de l’imaginarium » et les éditions « l’Ivre-Book » pour cette belle découverte.


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