dimanche 22 mars 2015

Le dieu était dans la lune d'Hervé Thiellement


Résumé: 
Dieu existe et elle est mégalomane. Elle n’a pas mauvais fond mais un peu d’adoration ne saurait nuire à son statut, alors elle entreprend d’asservir la galaxie à petites touches de destruction massive. C’est un peu long au début car elle est loin de tout, comme cette Terre d’où sont partis les Adventistes du Dernier Recours pour fonder la Nouvelle Alliance de l’Est Mortifère et qui feront d’excellents fidèles pour accomplir son Grand-Œuvre. Mais Labette veille et LE DIEU ETAIT DANS LA LUNE....


Mon avis:

Dans un court texte, précédant le premier chapitre, intitulé « justificatifs et remerciements »,  l'auteur, Hervé Thiellement, remercie les amis, auteurs et l'éditeur qui l'ont encouragé et aidé dans l'écriture de ce roman. Il explique aussi avec clarté et précision son objectif principal, distraire le lecteur et en profite pour annoncer la couleur : si le roman est un Space Opéra, il se veut avant tout un Space Op. déjanté !
L'idée me plaisait grandement. J'ai donc attaqué avec curiosité ce drôle de roman SF et très franchement, je ne l'ai pas regretté...

Le récit plonge tout de suite le lecteur, dans l'univers créé par Hervé Thiellement.
Nous rencontrons en premier Gontrand Rieu, jeune Humano en détresse, dont l'astronef est tombé en panne dans le Système de Cible. Pas un astronef dans les parages, personne pour l'aider. Celui ci s'entretient avec son « camgek » appelé Créon, petit animal télépathe, à la morphologie de lézard, qui se branche à l'oreille et sur le cerveau pour communiquer avec toute autre forme de vie équipée du même système (les pensées des uns et des autres étant traduites en langage compréhensible pour son hôte). L'auteur nous présente brièvement Gontran, ado ingrat et indiscipliné, il a été viré de sa pension éducative sur Triton, s'est acheté un astronef pour être coursier dépanneur.

Ce début, à lui seul, laisse immédiatement sentir la maîtrise de l'auteur d'un monde vaste et cohérent, d'inventions ambitieuses et ingénieuses, qui font appel à l'imaginaire, mais aussi à une maîtrise scientifique et technique (qui n'a pas toujours été à ma portée). Il révèle d'emblée l'étendue imaginative dont l'auteur a su faire preuve pour créer son univers. La suite le confirme et on retrouvera ce type de trouvailles, tout au long du récit. L'auteur veille à décrire ses nouveautés avec soin, mais sans lourdeurs, afin que le lecteur puisse s'approprier les caractéristiques étranges de son univers. Entrer dans le roman, c'est arriver en tant que touriste interplanétaire, pour découvrir de bien étranges merveilles. Il faut pourtant prendre soin de bien tout enregistrer, au risque de perdre le fil du récit. Chaque détail possède son importance, rien n'est inutile.

Donc, revenons à Gontran perdu dans l'espace et qui fait la rencontre la plus improbable qui soit : Labette, une anibulle venue à sa rescousse.
L'anibulle est un animal de taille immense et rare, capable de voyager sur de très longues distances en creusant des trous de ver, pour défier le temps. Spécialisée dans le commerce, activité dans laquelle celle ci excelle, au vu de ses dispositions à voyager en un temps record, elle cherche aussi à communiquer. En effet, loin des autres anibulles (dispersées dans l'espace, n'oublions pas qu'elles sont rares) Labette se sent seule. Elle recueille donc Gontran, qu'elle surnomme Gont à la manière de son Gamgek, et lui propose de l'accompagner dans ses aventures commerciales.
Ils commencent par être associés, avant de devenir amis et entreprennent de se lancer dans la contrebande et autres commerces pas toujours recommandables. Au fil de leurs vols dans l'espace et de leurs actions commerciales, ils font d'autres rencontres et Labette accueille en son sein d'autres membres d'équipage qui forment un ensemble hétéroclite.

Si Gont reste le capitaine du vaisseau, Labette a un caractère fort et a souvent le dernier mot sur les décisions à prendre, qu'elles soient commerciales ou non. Elle se laisse guider par son instinct et se trompe rarement. J'ai adoré cette immense bête, qui loin de ne représenter qu'un moyen de transport et malgré sa taille désavantageuse, sait s'imposer dans ce groupe comme une figure maternelle. Elle communique évidemment grâce à son gamgek et reste la meneuse du groupe. Il s'agit donc d'un personnage fort et extrêmement attachant.
Gont reconnaissable à ses cheveux mi long, premier arrivé de l'équipage, semble plus effacé, même s'il fait sentir qu'il tient à son rôle de capitaine et ses décisions s'avèrent également souvent judicieuses.
Lursu, deuxième embarqué, est un mécanicien du genre « poilu » et au caractère entier, qui sympathise facilement avec les autres.
Deux nouvelles équipières, rejoignent bientôt ces messieurs et apportent une touche de féminité et de sensualité, puisque des couples se forment bien vite. Ce sont deux anciennes strip-teaseuses, qui ne manquent pas de personnalité et de charme. Julie la rousse plus discrète s’efface un peu devant Chang, la changeling, qui possède la faculté de prendre la forme qu'elle désire. On la retrouve bien souvent sous la forme d'une humano brune, aux courbes suggestives, mais la coquine aime changer de forme en cas de besoin ou pour aguicher son partenaire.

Ces personnages, bien que sympathiques, manquent toutefois d'un peu de profondeur. Ils se font submerger par le charisme de Labette, par l'histoire et par l'univers foisonnant qui les entoure. La narration d'un point de vue externe a tendance à accentuer cette impression de distance.

Les quatre membres d'équipage sont ensuite rejoints par le professeur Heinz  et sa fille Irina, sauvés de justesse par Labette, quand un missile touche leur vaisseau.
Cet incident lance définitivement l'intrigue, quand Labette et son équipage mènent l'enquête, pour retrouver l'origine de cette agression. Les regards vont se tourner vers Gaude, la chose sur la Lune, déjà présentée depuis peu au lecteur. Cet être doté d'intelligence, qui a pris naissance dans la boue recouvrant la lune, semble prisonnière de celle ci. Seule, elle grandit, observe, reçoit des ondes, des informations. On suit sa croissance et le développement de son fonctionnement de pensée. L'auteur nous amène progressivement toutes ces données, le récit se posant en parallèle des aventures de Labette et son équipage. Le lecteur comprend peu à peu la relation qui les lie.

La construction du récit repose sur ce parallèle. La numérotation très particulière des chapitres contribue à identifier cette double narration, dont les fils s'entrecroisent jusqu'à la rencontre finale.
On constate également que les chapitres proposés sont très courts. L'auteur semble vouloir installer confortablement le lecteur, dans un rythme soutenu qui reste néanmoins agréable, et qu'il contrôle. A cela s'ajoute une plume claire et fluide, des dialogues naturels et plaisants.
Le livre se lit très bien et rapidement. Il est difficile de décrocher une fois la lecture entamée.

L'idée de m'être incarnée pour un moment en touriste interplanétaire n'a pas quitté mon esprit à la lecture du roman. Tourner les pages, m'a fait voyager, car j'ai pu découvrir grâce à Hervé Thiellement des planètes diverses, parfois paradisiaques, d'autres fois hostiles, mais toujours attrayantes en terme d'exploration livresque. L'auteur décrit avec détail chacune d'entre elle, avec un mot sur ses caractéristiques, des noms extravagants pour ses plats et boissons à déguster, ou sa population locale. L'auteur ne manque d’ailleurs pas d'anecdotes croustillantes à son sujet. Le décor est donc planté avec soin et on visualise l'ensemble sans mal. Il manque peut être une petite touche d'ambiance pour que le dépaysement soit parfait, mais j'ai tout de même apprécié l'exotisme de l'univers proposé.


En conclusion, l'auteur a atteint son objectif en ce qui me concerne. J'ai aimé cette lecture qui s'est avérée distrayante, même si le roman se révèle plus sérieux qu'il n'y paraît. Il a su me faire voyager et cela en très bonne compagnie ! 


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